Port-au-Prince/New York. Le réseau du mouvement social de l’Alliance bolivarienne pour l’Amérique (Alba Movimientos) rejette fermement la mission militaire en Haïti récemment décidée par le Conseil de sécurité de l’ONU. L’organisation décrit l’opération, qui a été menée par les États-Unis et le Panama au Conseil de sécurité des Nations Unies, comme la continuation d’une occupation étrangère. « Il ne s’agit pas d’aide, mais d’occupation. Ce n’est pas de stabilité, mais d’asservissement », a expliqué ALBA Movimientos.
Fin septembre, le Conseil de sécurité des Nations Unies a approuvé la transformation de la Mission militaire multinationale (MSS) dirigée par le Kenya en un groupe anti-gangs. La résolution a été adoptée avec douze voix pour et trois abstentions (Chine, Russie et Pakistan). Le nouveau mandat permet le déploiement de jusqu’à 5 500 forces en uniforme, dont des policiers et des militaires, accompagnés de 50 spécialistes civils. Selon l’ONU, l’objectif de la mission est de reprendre le contrôle de la capitale haïtienne Port-au-Prince et d’atténuer la crise humanitaire. La commande est initialement valable douze mois.
Dans un communiqué, la plateforme, qui regroupe plus de 400 organisations sociales de 25 pays d’Amérique latine et des Caraïbes, a critiqué la nouvelle mission comme un projet néocolonial qui porte atteinte à la souveraineté d’Haïti. Alba Movimientos rappelle que les missions de l’ONU ont toujours été présentes dans le pays depuis 1992, collaborant avec les forces réactionnaires, mais cela n’a fait qu’aggraver la crise. À l’époque aussi, on promettait de l’aide à la population, mais on exerçait un contrôle.
L’organisation accuse les acteurs internationaux de vouloir assurer leur domination économique et politique sous prétexte de sécurité. Chacune de ces interventions a encouragé le pillage des ressources naturelles et exacerbé les problèmes sociaux. Dans ce contexte, on peut citer les conséquences catastrophiques des missions précédentes, dont la mission MINUSTAH (2004-2017), au cours de laquelle des unités ont déclenché une épidémie de choléra.
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L’organisation réclame des réparations et un réel soutien de la part du peuple haïtien lui-même, ainsi que le retrait de toutes les troupes étrangères. Il appelle les mouvements sociaux, les syndicats, les organisations féministes et paysannes du monde entier à se mobiliser « pour une Haïti souveraine et digne ».
Haïti traverse sa pire crise, exacerbée par des élites corrompues et l’occupation étrangère, qui a laissé plus de 1,3 million de déplacés, six millions de personnes en insécurité alimentaire, 3 000 meurtres au premier semestre 2025 et des milliers de filles, garçons et femmes victimes de violences sexuelles.
Outre Alba Movimientos, de nombreux acteurs haïtiens critiquent également la nouvelle mission sous direction américaine. Outre le caractère néocolonial, l’inefficacité des programmes est critiquée. L’opération dirigée par le Kenya n’a démarré que neuf mois après son adoption en octobre 2023.
Il n’est pas certain que la nouvelle mission dirigée par les États-Unis puisse réellement améliorer la situation sur le terrain. Cependant, il portera un regard critique sur les mouvements sociaux en Amérique latine et au niveau local.