Antisémitisme en France : Avec Le Pen contre la haine des Juifs ?

L’unité de la France contre l’antisémitisme doit être démontrée par un grand rassemblement dimanche. L’extrême droite veut également s’y joindre.

PARIS | Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale française, et son homologue du Sénat, Gérard Larcher, ne s’y attendaient certainement pas. Face à la multiplication des incidents anti-juifs en France, les deux hommes avaient appelé en milieu de semaine à un grand rassemblement dimanche à Paris entre les deux chambres du Parlement. L’idée était de montrer que la nation est unie dans la défense des valeurs fondamentales de la république contre les attaques contre ses concitoyens juifs. Depuis le 7 octobre, le ministère de l’Intérieur a enregistré plus de 1 000 cas de menaces ou graffitis antisémites.

Tout le monde était appelé à protester ensemble contre cette vague d’antisémitisme, quelle que soit sa confession ou son appartenance à un parti. Mais l’extrême droite a également annoncé sa participation – et depuis lors, la controverse a fait rage. Au lieu de l’unité nationale espérée et d’une « Union sacrée », une « union sacrée » contre l’antisémitisme, les camps politiques sont divisés et les médias en parlent presque exclusivement.

Les deux chefs de chambre sont partis et estiment que la lutte contre la résurgence de l’antisémitisme doit être l’affaire de tous. La chef du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, et l’ailier droit Eric Zemmour, issu du parti Reconquête, se sentent également invités.

Mais pour le parti de gauche La France insoumise (LFI), l’idée de manifester « ensemble » avec une extrême droite préjugée par l’antisémitisme est une absurdité et une horreur.

LFI appelle désormais à une manifestation pro-palestinienne

LFI a immédiatement annoncé qu’il était hors de question pour des « raisons de principe » de participer à un tel rassemblement. Et de manière générale, il y a des raisons de soupçonner que cette manifestation sert à « normaliser un soutien inconditionnel au nettoyage ethnique à Gaza », a déclaré le député LFI David Guiraud sur la station BFM.

Parallèlement, LFI appelle à un rassemblement organisé samedi par de nombreuses organisations pro-palestiniennes place de la République pour manifester en faveur d’un cessez-le-feu immédiat à Gaza et de la paix au Moyen-Orient.

Même s’il serait en réalité tout à fait possible, voire politiquement logique, de plaider contre l’antisémitisme en France ainsi que pour un cessez-le-feu à Gaza ou pour le droit des Palestiniens à leur propre État ainsi que pour le droit des Israéliens à la sécurité et à la défense, les deux appels cela ressemble à un antagonisme tragique.

Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran et le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) ne souhaitent pas que le caractère du rassemblement de dimanche soit « dénaturé » par la présence démonstrative de Marine Le Pen et d’autres responsables politiques du RN.

Serge Klarsfeld triste face à l’antisémitisme à gauche

Le leader du CRIF, Yonathan Arfi, rappelle que ce parti a été fondé par des « anciens collaborateurs » des nazis. Jean-Marie Le Pen, longtemps chef du Front national et père de l’actuel chef du RN, a été condamné à plusieurs reprises pour des propos antisémites. Cela jette une ombre historique sur les efforts de Marine Le Pen pour faire table rase avec des déclarations catégoriquement pro-israéliennes.

L’avocat Serge Klarsfeld, connu comme un « chasseur de nazis », le pense cependant. Le Figaro, il faut « se réjouir qu’aujourd’hui (même) le Rassemblement marche nationalement contre l’antisémitisme ». Le fait que LFI n’y participe pas ou que dans le contexte du conflit au Moyen-Orient « l’antisémitisme se développe à l’extrême gauche » le rend triste.

La violente polémique entourant ce rassemblement pourrait dissuader certains citoyens d’y assister comme prévu initialement. Les anciens chefs d’Etat Nicolas Sarkozy et François Hollande, ainsi que la Première ministre sortante Elisabeth Borne, ont assuré vouloir être là dimanche. On ne sait toujours pas si le président Emmanuel Macron viendra également.