Washington. La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) a présenté son rapport « État d’urgence et droits de l’homme au Salvador ».
L’état d’urgence est en vigueur depuis mars 2022. À l’époque, le président Nayib Bukele l’avait justifié par une escalade de la violence des gangs et un taux d’homicides extrêmement élevé.
La Commission exhorte le Gouvernement à rétablir les droits et garanties suspendus par les décrets d’urgence. Elle souligne que cette mesure extraordinaire ne doit pas devenir un élément permanent de la politique de sécurité du pays.
Il réaffirme également l’obligation de l’État d’enquêter sur les violations des droits de l’homme, d’établir la vérité et de poursuivre et punir les responsables, tout en respectant les droits des victimes.
Le rapport contient 22 recommandations adressées au gouvernement pour renforcer la protection des droits de l’homme.
La CIDH a enquêté sur le décret législatif n° 333 sur l’état d’urgence décrété le 27 mars 2022 et ses prolongations ultérieures. Elle souligne que si les États sont tenus de prendre des mesures pour combattre et éradiquer la criminalité organisée, celles-ci doivent être conformes à leurs obligations juridiques et internationales.
Le rapport met également en évidence plusieurs changements législatifs qui adoptent une approche punitive. Il s’agit notamment du recours obligatoire à la détention provisoire pour certains délits, de la confidentialité de l’identité des juges lors des procédures pénales et de l’application de peines de prison pour adultes aux mineurs.
Selon les données disponibles, entre le 27 mars 2022 et début novembre 2023, 73 000 personnes ont été arrêtées, pour la plupart en détention provisoire.
La Commission a reçu de nombreux rapports faisant état de violations des droits de l’homme, notamment de détentions illégales et arbitraires systématiques et généralisées, de perquisitions illégales, de recours excessif à la force et de violations des droits des enfants et des jeunes.
Le rapport aborde les défis importants rencontrés pour garantir l’accès à la justice, notamment les retards dans le contrôle judiciaire des détentions, l’inefficacité des procédures d’habeas corpus, le manque de preuves pour étayer les accusations, les abus de la détention provisoire, les procès de masse, les restrictions du droit à la défense et garanties judiciaires et mépris des procédures régulières.
La Commission a exprimé sa grande préoccupation quant au traitement des enfants en détention et aux violations de leurs droits et garanties spécifiques.
Ces problèmes sont exacerbés par les conditions carcérales déjà précaires. Il s’agit notamment d’une grave surpopulation carcérale et d’un recours excessif à la détention provisoire. Le rapport cite des informations suggérant qu’entre 189 et 200 prisonniers pourraient être morts en détention et soulève de vives inquiétudes quant aux lacunes dans les enquêtes sur de tels cas, dans la notification des familles et dans le traitement des corps. Des informations sur la manière dont ces circonstances affectent les familles des personnes incarcérées sont également discutées.
Le CIDH et le Bureau du Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à la liberté d’expression ont examiné les réformes juridiques qui restreignent la liberté d’expression et la liberté de la presse, ainsi que les défis auxquels sont confrontés les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme. Elle rappelle que certaines garanties légales ne doivent en aucun cas être suspendues. La durée de l’état d’urgence doit être strictement limitée à la durée de l’urgence.
La Commission appelle le gouvernement à rétablir les droits suspendus et à prendre des mesures globales pour lutter contre les causes et les conséquences de la criminalité. Dans le même temps, les mesures de prévention, de surveillance et de réponse doivent être prises dans une perspective globale.
Parallèlement, à la demande du Président, le Parlement a prolongé l’état d’urgence pour la 30e fois de 30 jours le 4 septembre.