Manifestations au Sénégal : « Aujourd’hui, ce sont des vraies balles »

Les forces de sécurité sénégalaises répriment toute manifestation contre l’annulation de la date des élections du 25 février. L’opposition ne lâche rien.

SAINT LOUIS | La colère se déchaîne sur le pont qui relie la Langue de Barbarie, densément peuplée, et l’Île de Saint-Louis, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. Mardi en début de soirée, des dizaines d’adolescents et de jeunes adultes ont affronté les forces de sécurité dans la ville de Saint-Louis, au nord du Sénégal, près de la frontière avec la Mauritanie. Ces derniers ont pris position sur les ponts à midi pour éviter que d’éventuelles protestations ne se propagent.

Les manifestants regardent la place Faidherbe, où se trouve le siège du gouverneur. Les gendarmes regardent le soleil du soir et demandent aux passants de repartir. Ils restent également calmes lorsqu’un pavé vole à un moment donné.

La scène est également observée par certains touristes. Ils s’attablent autour d’un apéritif dans les nombreux restaurants installés dans les vieilles maisons de l’époque coloniale, ou embarquent en calèche pour leur faire visiter le plus ancien comptoir français de la côte atlantique de l’Afrique. Cela ne pourrait pas être plus opposé.

Des marches silencieuses ont été annoncées mardi au Sénégal pour protester contre le report de l’élection présidentielle par le président Macky Sall. Dans la capitale Dakar, la marche a été interdite à la dernière minute. « Aar Sunu Élection » (Protégez notre Constitution), une nouvelle coalition de la société civile, annonce de nouvelles manifestations à l’échelle nationale pour samedi.

Ne vous contentez plus de parler, mais votez

Portrait de Ndeye Magatte Seck.

Les manifestants ne reconnaissent pas le report des élections initialement prévues le 25 février au 15 décembre. Sur X Le député Guy Marius Sagna publie une photodans lequel il brandit des tracts du candidat à la présidentielle Bassirou Diomaye Faye et écrit : « Nous sommes en campagne électorale ».

Le gouvernement du président Macky Sall ne s’attaque pas à ce problème. À peu près au même moment où elle l’a fait une image vidéo publié avec un message clair : un « dialogue national » a été ouvert et est soutenu par les anciens présidents Abdou Diouf et Abdoulaye Wade. Les deux ont en un déclaration commune toutes les forces politiques et sociales sont appelées à y participer. La protestation est également dirigée contre cela. Beaucoup ne veulent pas parler, mais plutôt voter, maintenant, pas en décembre. Le dernier « dialogue national » remonte à moins d’un an.

Ndeye Magatte Seck veut aussi voter. La jeune femme de 23 ans étudie le droit commercial privé et fait du bénévolat dans sa ville natale de Saint-Louis en tant que secrétaire générale de la Chambre de commerce internationale pour les jeunes entrepreneurs (JCI) et vice-présidente d’une initiative citoyenne locale. Elle regarde la mer depuis un toit-terrasse et n’a pas encore perdu espoir. Elle dit qu’elle en a assez de voir sa vie dictée par les vieux et que les jeunes n’aient pas de voix. « On dit si souvent : vous ne le savez pas. Nous avons de bonnes idées, parfois même de meilleures. » Elle ne veut plus rester à l’écart de la politique, même si ses parents le souhaitent.

Les étudiants de tout le pays sont choqués

Parce que trop de choses lui sont arrivées ces douze derniers jours, ce qui la choque et l’horrifie. « Au début, ils utilisaient des gaz lacrymogènes contre les manifestants, aujourd’hui ils utilisent de vraies balles. » Puis un nom revient : Alpha Yoro Tounkara. L’étudiant en géographie est l’une des trois personnes tuées lors de la répression des manifestations de vendredi dernier et un ami de Ndeye Magatte Seck. « Nous venons du même village et nous nous connaissons depuis longtemps. C’était un élève brillant, très discipliné et très calme.

La jeune femme a d’abord été surprise que lui, entre autres, manifeste. Mais cela montre à quel point de nombreux Sénégalais sont désormais mécontents, dit-elle.

La mort de Tounkara a choqué les étudiants de tout le pays. Selon les informations d’un enseignant, les étudiants de son université, Gaston Berger, ont bloqué les rues pendant le week-end. Suite à un appel du syndicat universitaire indépendant SAES, des grèves ont également eu lieu lundi et mardi à l’Université Assane Seck de Ziguinchor, dans la région de Casamance, au sud du Sénégal. Le lycéen Landing Camara y est décédé samedi.