L’ONU peut à nouveau apporter des fournitures d’aide à la région du Soudan touchée par la famine. Les négociateurs réclament des « couloirs humanitaires » à travers le pays.
Pour la première fois depuis des mois, l’aide humanitaire destinée aux victimes de la guerre au Darfour a traversé la frontière depuis le Tchad voisin. Après des mois de fermeture par le gouvernement soudanais, un convoi du Programme alimentaire mondial (PAM) de l’ONU a pu franchir mardi soir le poste frontière d’Adré, le point de passage le plus important entre le Tchad et le Soudan.
Les informations exactes sur l’étendue et la destination de la livraison n’étaient pas encore disponibles mercredi. Mais la semaine dernière, lorsque le gouvernement militaire soudanais a annoncé pour la première fois l’ouverture d’Adré, le PAM a annoncé que deux convois de camions transportant environ 6 000 tonnes de nourriture étaient en préparation pour un demi-million de personnes. Plus tard, on a parlé de 131 camions à la frontière.
« Nos camions ont traversé la frontière », a déclaré mercredi soir Rania Dagash du PAM au Soudan. « Plus d’une douzaine » de camions étaient arrivés, a confirmé mercredi la coordinatrice humanitaire de l’ONU pour le Soudan, Clémentine Nkweta-Salami.
Les experts mettent en garde contre jusqu’à 2,5 millions de morts de faim
Bien sûr, cela ne suffit pas. Selon l’ONU, plus de 25 millions de personnes au Soudan, soit plus de la moitié de la population, sont gravement menacées par la faim. Fin juillet, des experts de l’ONU ont diagnostiqué une famine dans le camp de déplacés de Zamzam, près d’El Fasher, au Darfour. Les experts prédisent que jusqu’à 2,5 millions de personnes mourront de faim dans tout le pays d’ici fin septembre.
La guerre qui fait rage depuis avril 2023 entre l’armée soudanaise du président et chef de l’armée Abdelfattah al-Burhan et la milice RSF (Rapid Support Forces) de l’ancien vice-président Hamdan Daglo Hametti est celle qui a causé le plus de morts et de déplacements au Darfour. L’armée a bouclé les frontières extérieures et les autoroutes vers le Darfour pour couper l’approvisionnement des RSF ; donc la milice vit du pillage de la population civile. Des millions de personnes sont en fuite. Selon l’ONU, l’ensemble du Soudan compte désormais 13 millions de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur du pays.
Adré, le plus grand poste frontière du Tchad, a été utilisé pour la dernière fois par le PAM en mars. Elle ne dessert normalement que l’ouest du Darfour. La route la plus directe vers El Fasher est plus au nord ; Ce petit poste frontière de Tine a été ouvert pour la dernière fois fin mai et est actuellement impraticable en raison des inondations.
Le représentant spécial américain appelle à des « couloirs humanitaires »
L’accès aux populations affamées du Soudan est la question clé des pourparlers sur le Soudan à Genève, ouverts le 14 août par l’envoyé spécial américain Tom Perriello. Jeudi, l’armée a promis d’ouvrir Adré, après quoi RSF a promis une « coopération » pour l’acheminement de l’aide samedi.
Selon le gouvernement, Adré sera initialement ouvert pendant trois mois. Un comité dirigé par les autorités militaires de Port-Soudan est chargé du transport de l’aide au Soudan. Le processus d’approbation est considéré comme fastidieux et de nombreuses routes sont dangereuses ou impraticables. Selon le PAM, plus de 50 camions transportant 4 800 tonnes de nourriture étaient bloqués dans divers endroits du Soudan au cours du week-end.
Perriello fait pression pour trois « couloirs humanitaires » à l’intérieur du pays, dont la sécurité doit être garantie par les deux parties belligérantes – pas seulement depuis le Tchad, mais aussi depuis Port-Soudan à travers le pays. Mercredi, le journaliste Yousa Elbagir s’est montré sceptique quant à l’arrivée rapide de la livraison via Adré à destination : « C’est le pic de la saison des pluies et les chauffeurs doivent traverser des terrains très difficiles, sur le territoire dangereux de RSF. »