Le mouvement pachtoune interdit

Le mouvement pacifique pachtoune PTM réclame courageusement justice de la part des puissantes militaires depuis des années. Cela s’applique plutôt à la loi antiterroriste.

Islamabad | Le Mouvement de protection civile pachtoune (PTM – Pashtun Tahafuz Movement) souhaitait en effet rencontrer ce vendredi des milliers de partisans dans le district de Khyber, au nord-ouest du Pakistan, pour une jirga de trois jours, une réunion politique tribale. Mais ces derniers jours, les autorités ont interdit non seulement la Jirga, mais aussi le mouvement de masse PTM, fondé en 2014.

La police a même utilisé des gaz lacrymogènes et des balles réelles contre des militants du PTM sur le lieu de rassemblement situé dans la ceinture tribale. Quatre ont été tués et des dizaines blessés.

PTM défend les droits des Pachtounes. Avec une part de population de près de 20 pour cent, soit environ 45 millions de personnes, ils constituent le deuxième groupe ethnique du pays.

En tant que mouvement social populaire, le PTM critique avec audace l’oppression des minorités ethniques par la puissante armée, qui est un État dans l’État au Pakistan. Les militants pachtounes, ainsi que ceux d’autres minorités telles que les Baloutches, sont enlevés, torturés et tués à plusieurs reprises par l’armée et la police. Cela ne sera jamais traité légalement.

Les médias subissent des pressions pour ne pas parler du PTM. Le mouvement appelle à la création d’une commission vérité et à la fin des disparitions forcées et des exécutions extrajudiciaires par le biais de manifestations pacifiques et de rassemblements à grande échelle.

Pacifique dans le cadre de la constitution

Contrairement aux talibans terroristes au Pakistan et en Afghanistan, qui recrutent également des Pachtounes vivant des deux côtés de la frontière, le PTM opère de manière pacifique dans le cadre de la Constitution et se mobilise fortement via les réseaux sociaux.

Le PTM considère les Pachtounes et lui-même comme des victimes du terrorisme ainsi que des victimes des lois antiterroristes. Ils confèrent aux militaires des pouvoirs étendus, même si leur application peut difficilement être légalement vérifiée.

Selon la loi antiterroriste de 1997, les interdictions d’organisations telles que le PTM ne nécessitent aucune preuve. Il suffit qu’ils soient déclarés terroristes par les organes de sécurité.

Le ministre de l’Information, Attaullah Tarar, a justifié l’interdiction uniquement en affirmant que le PTM entretenait des relations avec les talibans pakistanais et avec les services secrets étrangers, incitait à la violence et à la haine, utilisait une « rhétorique anti-pakistanaise » et promouvait le séparatisme. Il n’a fourni aucune preuve.

Le PTM rejette les allégations et souligne son caractère pacifique. La Commission indépendante des droits de l’homme du Pakistan qualifie l’interdiction des PTM de « décision extrême » et, comme Amnesty International, appelle à son annulation. L’organisation de défense des droits humains parle d’une « atteinte au droit à la liberté de réunion ».

L’importance du PTM pour la société civile et sur le plan politique réside dans le défi qu’il lance à l’appareil de sécurité et dans son engagement envers les communautés marginalisées qui défendent la démocratie, la justice et les droits de l’homme.

Le déploiement d’une commission vérité est nécessaire

Le leader du PTM, Manzoor Pashteen, 29 ans, a déclaré lors d’entretiens que l’armée et le gouvernement se sentaient menacés par le PTM « parce que nous revendiquons nos droits fondamentaux à la paix dans nos régions et exigeons que l’État forme une commission vérité pour punir l’armée pour ses actes ». actions brutales dans les provinces du Khyber Pakhtunkhwa et du Baloutchistan.

L’avocate des droits de l’homme Iman Mazari qualifie l’interdiction du PTM d’« illégale et inconstitutionnelle » : « Un mouvement qui revendique à plusieurs reprises ses droits légitimes depuis 2018 et qui n’a jamais été impliqué dans aucune forme de violence est placé dans la même catégorie que de nombreuses organisations terroristes. » Le PTM est poussé à des actions violentes pour faire entendre sa voix.

Samar Bilour, du parti libéral d’opposition Awami National Party, a également critiqué l’interdiction du PTM dans une interview avec . Mais elle rejette également la menace du PTM de faire sécession des zones pachtounes si les droits des Pachtounes étaient encore violés.

Pendant la période coloniale britannique, les zones de peuplement pachtounes ont été séparées en 1893 par la ligne Durand, du nom d’un diplomate britannique. Depuis lors, les Pachtounes vivent des deux côtés de la frontière pakistano-afghane, difficile à contrôler et longue de 2 460 kilomètres.

Malgré l’interdiction et les tirs des militants, le PTM souhaite continuer à organiser la Jirga.