Les communautés zapatistes du Mexique se donnent une nouvelle structure

San Cristóbal de las Casas. « Nous avons coupé le sommet de la pyramide. Ou plutôt, nous l’avons renversé. » C’est par ces paroles que le sous-commandant Moises, porte-parole de l’EZLN (Ejército Zapatista de Liberación Nacional – Armée Zapatiste de Libération Nationale), a annoncé des changements profonds dans la structure organisationnelle du gouvernement autonome zapatiste.

L’EZLN a d’abord annoncé la dissolution de ses anciennes structures dans un communiqué, puis la semaine dernière, à l’occasion du 40ème anniversaire de la fondation de la guérilla, a annoncé d’importants changements. Désormais, les compétences du mouvement basé dans le sud du Mexique devraient être exercées plus fortement par les communautés de base. Dans ce contexte, ils devraient par exemple assumer le contrôle organisationnel des écoles et des cliniques.

Le sous-commandant Moises a justifié les changements en affirmant que la nouvelle structure renforcerait l’indépendance des différentes communautés. Les zapatistes mettent en garde depuis des mois contre l’escalade de la violence au Chiapas. Ils en imputent la responsabilité aux groupes criminels, mais aussi aux acteurs étatiques.

Dans le contexte plus large de cette situation, l’EZLN s’attend à une augmentation des menaces telles que les guerres, les épidémies et les catastrophes naturelles qui seraient imposées par le système capitaliste : « Ce nouveau niveau d’autonomie est conçu pour affronter le pire de l’Hydre, son infâme « La bestialité et sa folie destructrice (…) Nous nous sommes préparés à la survie de nos peuples, même s’ils sont isolés les uns des autres », a déclaré le sous-commandant.

L’EZLN est l’un des mouvements sociaux les plus connus au monde. Elle a été fondée en 1983 par un groupe d’intellectuels mexicains influencés par la Révolution cubaine. Dans le même temps, les zapatistes ont des racines profondes dans divers peuples mayas de l’État méridional du Chiapas. Celles-ci étaient déjà très politisées avant la création de l’EZLN et exigeaient la fin de la discrimination et de l’exploitation de la population indigène ainsi qu’une réforme agraire.

Ces revendications ont été formulées le 1er janvier 1994 avec un véritable fracas : des milliers d’indigènes partisans de l’EZLN ont occupé diverses municipalités et villes du Chiapas. L’un des éléments déclencheurs de cette situation a été l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), qu’ils considéraient comme une trahison croissante du pays.

Après douze jours de combats armés, un cessez-le-feu a été conclu grâce à la pression sociale. L’EZLN s’est retiré dans la forêt tropicale de Lacadon, à la frontière avec le Guatemala. Les négociations se déroulèrent sous la médiation de l’évêque catholique Samuel Ruiz, qui aboutirent à la signature du Traité de San Andrés deux ans plus tard. Celles-ci prévoyaient l’inclusion des droits à l’autonomie de la population autochtone dans la constitution. Cependant, cela n’a jamais été mis en œuvre. L’EZLN a finalement créé une autonomie de facto (Municipios Autónomos Rebeldes Zapatistas – Marez) dans l’est du Chiapas.

Dix ans plus tard, le processus d’autonomie a été avancé par la consolidation du Marez en cinq zones, appelées Caracoles. Dans chacun d’eux, un JBG (Juntas de Buen Gobierno – Conseil de bon gouvernement) a été créé, censé coordonner les activités du Marez concerné à un niveau supérieur.

Dans le cadre du changement structurel qui s’opère désormais, Marez et JBG seront dissous. Désormais, le zapatisme devrait être encore plus centré sur le niveau local. Partout où se trouvent des bases de soutien zapatistes, des gouvernements locaux autonomes (Gobiernos Autónomos Locales – Gal) devraient être établis, sous le contrôle des assemblées respectives des villages, des communautés ou des quartiers et chargés de répondre aux besoins locaux dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la nutrition. et la justice sont responsables.

Dans une approche ascendante, les travaux ultérieurs devraient être délégués à partir de ce niveau local. Les gouvernements locaux ont la possibilité de coordonner les besoins qui dépassent leurs propres capacités au sein des collectifs des gouvernements autonomes zapatistes (Colectivos de Gobiernos Autónomos Zapatistas – CGAZ). Ces plateformes permettent d’échanger et d’organiser des activités telles que la mise en œuvre de campagnes de vaccination ou d’alphabétisation ainsi que des événements culturels et sportifs de plus grande envergure.

Les rassemblements des collectifs des gouvernements autonomes zapatistes (Asambleas de Colectivos de Gobiernos Autónomos Zapatistas) ont une portée encore plus grande. En un sens, ils remplacent les zones précédentes et convoquent des réunions lorsque le Gal ou la CGAZ le souhaitent.